MARSTRAND - Histoire d'une île - page 134

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pour le Bohuslän peut facilement s’imaginer. Comme il n’y avait plus rien à
gagner dans l’archipel, celui-ci se trouva rapidement vidé de sa population
comme si la peste avait passé par là. Les coûteuses installations furent
abandonnées et quand tout ce qui pouvait être enlevé eut été pris il ne resta plus
sur les îlots que les ruines des bâtiments démolis.
Nous avons visité un certain nombre des endroits où se dressaient les
huileries et les saleries de hareng au temps de leur prospérité. En particulier à
Stenholmen à un demi mille de Marstrand apparaissent clairement les vestiges
de l’activité trépidante qui régnait alors. Toute l’île est marquée par les traces
des murs de soutènement des maisons d’ouvriers, des saleries et des fourneaux,
on trouve encore de grands tas de grumes dispersés, les quais ruinés témoignent
des vastes sommes qui furent investies ici et du sommet de l’île on voit des
ruines tout autour dans toutes les directions.
La pêche au hareng moderne
Pour autant qu’on puisse en juger d’après les multiples périodes de
prospérité gaspillée et d’extrême pauvreté qu’a connues le Bohuslän au cours
des derniers siècles, il semble que les soudains accès de richesse n’aient pas été,
loin de là, une bénédiction. L’expérience montre en effet que l’agriculture du
pays a souffert chaque fois du retour du hareng puisque la main d’oeuvre et le
capital étaient attirés vers cette pêche fructueuse, négligeant les vraies tâches de
modernisation. Quand ensuite la pêche au hareng avait cessé brusquement, la
population côtière s’était trouvée à découvert avec ses équipements, ses bateaux
et ses magasins chèrement acquis mais désormais sans valeur, et en même temps
les champs abandonnés étaient devenus stériles.
La pêche au hareng moderne, qui a commencé à la fin du XIX
ème
siècle,
est en revanche fondée sur des principes tout différents des précédentes pêches
prédatrices temporaires, voulant à leur place donner à la pêche un caractère plus
stable, comparable le plus possible au travail saisonnier annuel d’un
campagnard. C’est la motorisation qui a provoqué cette révolution dans la pêche
et qui a littéralement multiplié son intensité. De même qu’aujourd’hui des
machines et équipements perfectionnés ont amené une révolution dans
l’agriculture, la pêche elle non plus n’a pas échappé aux effets du
développement de l’industrie moderne avec de meilleurs instruments etc. mais
c’est pourtant le moteur qui avant toute chose a été l’invention déterminante
pour la pêche - permettant de vaincre les calmes plats, de raccourcir les
distances, de poursuivre le poisson loin au delà des zones antérieures, de
surmonter les courants marins, de commander mécaniquement les cordes et
cordages des sennes de hareng etc.
Même si au début le moteur a semblé une acquisition relativement chère,
il contient en lui-même tant de chances d’augmenter les gains qu’il s’amortit
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